FRAGMENTS – Une infinité de possibles
Depuis quelques temps, quelques années peut-être, j’avais l’envie de modeler à nouveau la
terre. Cela ne m’était plus arrivé depuis la réalisation du Testament en 2012, série de 12
tondos de grands formats.
Aujourd’hui je ne crois pas connaître mieux la sculpture que lorsque je l’ai débutée à 14
ans. Son immensité m’était alors inconnue et je n’avais aucune idée, bien sûr, qu’elle fût
infinie, qu’une pièce achevée ouvre toujours de nouvelles portes et pose de nouvelles
questions. Le savoir à présent m’éclaire et m’impose de me mettre chaque jour et à
perpétuité dans la peau d’un débutant. Je me souviens de ce que m’avait dit Robert
Couturier lors d’une de nos rencontres chez lui à propos d’une de mes sculptures: «C’est
bien ce que tu fais mais si c’était moi, j’essaierai de jouer davantage, d’apporter un peu plus
de légèreté, d’ introduire de la fantaisie mais cela vient avec l’age et tu es encore très
jeune.» Il avait près de quatre-vingt dix ans.
Cette liberté qu’il me montrait et qui me faisait rêver, je crois que je commence à oser
l’aborder aujourd’hui. La maturité, l’expérience de près de 50 ans de pratique et le retour au
travail de la terre que j’ai si souvent utilisée dans ma jeunesse, ont été déterminants pour la
réalisation de cette série que j’ai titrée Fragments.
Le modelage de l’argile offre la possibilité de fréquentes et radicales modifications,
d’infinies variations très rapides, il permet un travail impulsif et à l’imprévu de s’exprimer
pleinement. Comme j’aime le dire: «à l’atelier, c’est le hasard qui travaille le plus».
L’essentiel pour moi est de choisir si je conserve ou élimine ce qu’il vient d’apporter. Outre
des opportunités plastiques, il peut aussi proposer de nouveaux sujets et c’est en voyant les
photographies du plâtre du Testament 4 cassé lors de son moulage que j’ai eu l’envie de
réaliser une série de sculptures qui seraient comme ‘issues d’accident’. En revenant aux
bases de l’apprentissage, j’ai modelé une trentaine de torses, théme intemporel de la
sculpture figurative que j’ai nommés Apsaras puis, la série Les Colisées un ensemble de
tondos proche de mon idée de départ.
L’ensemble de ce travail fait écho à une des principales leçons que Serge Lorquin m’a
donnée: «Comme Michel-Ange, Rodin et tant d’autres l’ont affirmé à raison, chaque partie
qui la compose doit contenir la sculpture en entier». Giacometti disait: «Si vous cassez une
sculpture chaldéenne en quatre, vous aurez quatre sculptures chaldéenne».
Le fragment n’est plus, dés lors, appréhendé qu’à travers sa forme ce qui permet au jeu de
se développer dans toutes ses dimensions et à un sujet même très classique d’exprimer et
de générer une infinité de possibles.
Ouverture de l’exposition, le samedi 15 juin dés 16 h
Galerie Le Clos des Cimaises
17 700 Saint-Georges-du-Bois
15 juin > 22 sept 2024
14h30 à 19h30 tous les jours (sauf mardis et mercredis)